L'arrière-saison des lucioles by Henri Raczymow

L'arrière-saison des lucioles by Henri Raczymow

Auteur:Henri Raczymow
La langue: fra
Format: epub
Tags: Vie littéraire;Littérature juive;Portraits;Humour juif
Éditeur: Editions de l'Antilope


*

Il y a untel et unetelle. Et puis il y a Berthe. Qui échappe au lot commun. Et cela devint de plus en plus vrai à mesure des années. Là, je puis vraiment dire : parce que c’était elle, parce que c’était moi. Hormis les treize ans qui nous séparaient. Elle avait été, quelque part dans le Tarn, une enfant cachée qui, au retour chez elle à Paris, ne devait plus retrouver son père, parti là-bas en fumée. Nous partagions, je crois, quelques traits communs qui pouvaient aisément s’accorder. Comme nous aimions bavarder de choses et d’autres, elle et moi ! Je m’en étonne encore aujourd’hui. Jusqu’au jour où, en raison de je ne sais quelle maladie dégénérative, elle perdit peu à peu son souffle et sa parole devint plus embarrassée, plus sourde, et, pour moi qui entendais toujours un peu plus mal, bientôt presque inaudible. Cela devint un jour un véritable dialogue de sourds, c’est le cas de le dire. Au téléphone, ce fut pire encore : je ne comprenais pas un traître mot de ce qu’elle s’efforçait d’articuler. Restaient, de loin en loin, les brefs messages de nos ordinateurs.

Avant cela, du temps où nous étions encore un peu vaillants, nous nous parlions comme, j’imagine, de vieilles copines. Et pourquoi vieilles, d’ailleurs ? Non, comme des copines, voilà tout. Nous parlions même de sexualité. Par exemple de l’impuissance masculine. Je ne sais plus comment nous en vînmes à ce sujet. Peut-être en évoquant un film vu récemment à la télévison : la Débandade, de Claude Berri, film que nous avions l’un et l’autre trouvé fort courageux. Berthe pensait que débander n’était pas si grave : cela arrivait souvent, et chez tous les hommes. Mon sentiment était au contraire que c’était très humiliant, tant pour l’homme que pour la femme. À l’appui de ma thèse, je lui racontai la confidence d’un ancien ami. Au cours d’une soirée, il rencontre une jeune femme qui aussitôt l’attire. Ils parlent d’abondance puis ils flirtent, puis se mettent à l’abri des regards. Là, ils s’enlacent, se pelotent, se bécotent avec fougue. Et de s’esquiver. Elle l’emmène chez elle : même jeux de caresses et de baisers. Mais une fois sur le lit, coup du sort, il n’y arrive pas. La dame se met alors en colère contre celui qui s’est révélé infichu d’être son amant malgré les promesses et le congédie sans ménagement. Et Berthe et moi de nous demander pourquoi diable la dame est si en colère. C’est parce qu’elle est très frustrée, sexuellement frustrée, selon Berthe. Pour moi, la femme a été humiliée, de n’avoir pas suscité un irrépressible désir chez cet homme décevant. Sa réaction est plus psychologique que physiologique. Berthe n’est pas de cet avis. Je lui laisse le dernier mot. Après tout, de nous deux, c’est elle la femme. Un silence, puis : « C’est bien, avec toi, on peut parler de sexe, comme avec une copine. »

Un peu plus tard, je me suis dit que les hommes devraient



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